mardi 24 mars 2015

Grouzia

Grouzia ce n'est pas Grozny, Grouzia c'est la Géorgie (en russe) et Grozny c'est la Tchétchénie, la Fédération de Russie donc. Je ne vais pas dire "aucun rapport" car ce sont des républiques voisines. Voisins qui étaient tous deux frères dans le cadre de la grande Union Socialiste Soviétique. Ça laisse des traces évidemment. Profitez-en pour actualiser vos connaissance sur la situation de la Tchétchénie avec ce formidable documentaire : Une guerre sans trace.
La Géorgie est très différente de la Russie de Moscou, Saint-Pétersbourg sans parler de la Bouriatie pour ne parler que des découvertes présentées dans ce blog. Il faudrait peut-être connaître les provinces ou républiques russes du nord du Caucase -justement- pour découvrir des similitudes plus profondes. Dans le quotidien, on retrouve la langue russe puisqu'elle était enseignée en Géorgie jusqu'à l'arrachement à l'URSS en 1991. Aujourd'hui elle est facultative à l'école. Donc dans 20 ans, les liens ne seront plus du tout les mêmes, les Russes devront parler anglais. En espérant que l'armée rouge accepte cet état de fait. Dans le quotidien on retrouve aussi l'art de la table mais ça c'est français car à Moscou on mange comme les Américains, n'importe comment, à n'importe quelle heure et rapidement. A table, on m'a proposé de la vodka ; elle était très parfumée, à mille lieues de celle de Russie car il s'agissait de vodka de raisin, à comparer à de l'eau de vie de fruits, au Marc de Bourgogne. Elle était pourtant incolore. On trouve aussi de la vodka de raisin à Moscou qui est légèrement brune et plus parfumée mais ce n'est pas celle qui est la plus consommée. Et du pain. Le Géorgien ne peut pas manger sans pain. Ça me rappelle quelqu'un. Pour le vin lui-même on en reparlera plus tard.
La culture géorgienne est très ancienne, en témoigne cette langue incroyable très utilisée. Tout est écrit en géorgien mais ils ont eu l'ouverture d'esprit de doubler tous les affichages par de l'alphabet latin, en langue anglaise. L'écriture est déboussolante mais la prononciation est bien pire. Imaginez : notre guide géorgienne nous confia que les langues russe et française étaient simples ! C'est un peu le grand écart quand on vient de Moscou où, quand vous trouvez un menu en anglais dans un restaurant, vous constatez la plupart du temps que le serveur n'est pas en mesure de prendre la commande à partir de ce support.

Les Géorgiens ont été dominés, écrasés par l'empire ottoman ou les Perses, envahis par les Russes (certes après un traité d'alliance) mais ils ont su replanter les vignes et sauver leur langue. Les indépendantistes n'ont pas eu non plus la vie facile au XXème siècle sous Staline qui connaissait particulièrement la région puisqu'il y était né. Et cette culture est toujours là, bien vivante, riche de son histoire.
En haut de la colline de Tbilissi, une immense statue de femme recouverte de métal argenté tient un glaive d'une main -pour accueillir son ennemi comme il se doit- et une coupe de vin dans l'autre main -pour recevoir son ami. Et pour achever la description de la capitale, un des monts qui la compose est dominé par une gigantesque antenne de télévision, au pied de laquelle s'étend un parc de loisir bétonné, délaissé à cause de ses prix devenus disproportionnés par rapport aux revenus moyens des habitants (vous pouvez voir un panorama de Tbilissi dans l'article précédent).
Si l'on va jusqu'au parlement, on passe par თავისუფლების მოედანი, place sur laquelle se trouve le monument de la liberté, Saint Georges terrassant le dragon. C'est également le symbole qui orne les armes de la ville de Moscou et qui est au centre des armoiries de la Russie. Décidément. Fait de mythologie qui remonte à la Mésopotamie antique, avant Jésus Christ. Mais assez parlé, prenons la voiture.
On roule vers l'est, en direction de l’Azerbaïdjan. Ici, en Géorgie orientale, le climat est continental et méditerranéen excepté en altitude où il devient alpin. Le relief est toujours présent ; quand on ne voit pas de somment enneigé, il y a de la moyenne montagne ou des collines. Autant vous dire que c'est un territoire parfait pour l'industrie hydroélectrique. Du pétrole, il y en aussi, comme à Bakou, le pays voisin. Des prospections sont en cours, avec l'aide de sociétés étrangères. Donc nous roulons. Les vignes s'étalent sur les coteaux ensoleillés. Ouvrez les fenêtres de la voiture, fermez les yeux. Vous entendez le bruit du vent dans les feuilles et sentez les odeurs des pêchers et des abricotiers couverts de fruits, qui bordent le bord des routes. Et vous pouvez vous arrêter pour cueillir des fruits. Donc nous nous arrêtons. On ouvre les yeux. Déjà, nous n'avions pas ouvert les fenêtres car ce début de printemps est frais, ensuite nous n'avons pas entendu le bruit des feuilles car elles n'ont pas encore poussé et quant aux fruits, on peut juste espérer en trouver séchés, sur les marchés. On ne peut pas toujours partir en vacances les mois d'été !
Quelle bonne idée d'avoir gardé le M de métro !
Je referme les yeux, je déglutis et sens le jus parfumé de la pêche couler dans la gorge [d'Annie - ça c'est pour la chanson] et imprégner mes papilles. Elle est au paradis [encore la même chanson "Annie aime les sucettes à l'anis" de notre cher Gainsbarre].
Nous roulons encore. Et là, soudainement, nous changeons de pays. Il n'y a pas de frontière, non. Les arbres se sont arrêtés, toute la végétation a décidé de ne pas aller plus loin. Les collines se succèdent et elles ne sont plus recouvertes que par un minuscule tapis herbeux. Le paysage est devenu désertique J'adore. Il n'y a pas rien, il y a tout. Tout, moins le superflu. Les seuls hommes qui vivent ici ont tout en eux, ils ont la foi. Ils vivent dans une très vieille cité troglodyte à une heure de route. Mais avant d'arriver jusqu'à ces chambres creusées dans la montagne, nous avons un autre rendez-vous avec l'Union Soviétique.
Dans ce semi-désert qui est presque une steppe, surgit une ville. Aujourd'hui sans eau, sans habitant, ou presque. Hier, le régime soviétique avait édifié cette cité pour montrer que rien ne lui était impossible. Un modèle que l'on présentait aux visiteurs. L'eau alimentait le village et irriguait des cultures. Aujourd'hui, on croirait un décors de cinéma. Un homme, il y a peu, y a ouvert parait-il un café, nous n'avons pas eu le temps de faire halte. Sur la petite route principale qui traverse Udabno (ça sonne tellement russe ; il y a bien удобно mais l'accent est sur le premier "o" donc ça se prononce oudobna qui veut dire confortablement mais j'ai lu sur un blog anglophone que ça signifierait désert en fait), quand on parvient à éviter les énormes trous dans la chaussée, l'on peut voir une petite maison blanche avec une porte ouverte. Nous n'avons pas vu une âme mais c'était là. L'après-midi est déjà bien avancé et non seulement il est prévu de monter voir les troglodytes mais surtout il va falloir rentrer dormir à Tbilissi par cette route avec la nuit. Avec la seule lumière des phares, il va falloir rouler au pas pour éviter les trous desquels notre véhicule ne saurait sortir.On n'est pas couché. Mais je ne dis rien, je ne vais pas faire le rabat-joie. 
Ouf le goudron s'arrête, ce ne sera pas plus mal sur de la piste. Quoique... Au moins la chaussée ne s'affaissera pas brutalement suite à des ravinements trop violents. Là, c'est toute la piste qui est marquée et déformée par les ruissellements. C'est plus visible et le chauffeur peut anticiper. C'est déjà ça. Je vous conseille le 4x4 si vous avez le choix. Une piste continue sur la droite, nous, nous prenons à gauche. Le chauffeur se retourne pour regarder les rares panneaux de signalisation. A-t-il déjà décidé que nous n'allions pas faire le même chemin dans l'autre sens ? A ce moment là du voyage, je n'ai pas du tout subodoré que c'était ce à quoi il pensait. Ah ! Nous voilà arrivés. 
Waou ! (à suivre).

4 commentaires:

Unknown a dit…
Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.
Unknown a dit…

Bonjour Christophe,
quel plaisir de lire les textes sur la Géorgie, un pays merveilleux. J'ai y posé mes pieds une seule fois, et que dans la montagne. Suis pas allée dans les villes, sauf une, le Sokhumi en Abkhazie. A l'époque, c'était la province de Géorgie. Je faisais de l'alpinisme dans les montagnes de Caucase... et j'ai pas eu assez de temps pour visiter La Géorgie. Je vais suivre tes aventures avec grand plaisir.

Si je peux me permettre... les russes ne disent pas Grouznia, mais Grouzia. Il n'y a pas de N ;)

(j'ai supprimé mon premier commentaire parce que je voulu le corriger, et c'était impossible)

Christophe GIBOURG a dit…

Merci pour ce commentaire doublement intéressant ; comment ai-je pu laisser passer une telle faute, le lien avec Grozny je suppose. Je suis un tantinet perfectionniste, je me relis beaucoup... et trouve (aussi) sans cesse des erreurs. La montagne c'est pour un peu plus tard, patience.

Anonyme a dit…

Здравствуйте! ...(si google translate est juste....pas sur...)

1/ Georges (et son dragon) = Youri (il me semble) = ça me rappelle quelqu'un....

2/ Je n'ai pu voir qu'un extrait du reportage sur la Tchéchénie ( la vidéo n'est plus disponible) mais, il y a peu, j'avais vu un reportage sur Ramzan Kadyrov assez édifiant !

3/ Pour modifier le message, il faut faire "apercu" puis "modifier"...cependant je me présente toujours sous "anonyme" car je ne sais comment faire autrement...

Trop hâte de lire la suite de vos aventures géorgiennes !!!

@+

Anne E & Co

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