Pas question de dormir pour absorber le décalage horaire : nous enchaînons avec une journée occupée. Exploration de la ville de Pétropavlovsk-Kamtchatski, il est dix heures du
matin. Pour nos corps, il n’est qu’une heure. Les monuments urbains sont sans intérêt, heureusement que nous ne sommes
pas venus pour ça. Vue sur la ville, sur la baie. Iégor, notre guide russe anglophone, nous propose un
restaurant coréen : heureuse idée
puisque nous sommes proches de ce pays asiatique, comme jamais ! Je mange
une soupe au kimchi très épicée. Mais quand est-ce qu’on dort ?
Nous partons pour la
grande plage de sable noir de Khalaktirski : 20 km de longueur sur le
Pacifique. Les éclaircies sont d’autant plus belles que le ciel reste couvert. Les
risques d’intempéries ont cloué au sol les hélicoptères ; c’est fréquent,
nous avons été prévenu, le temps est imprévisible ici, entre la mer d’Okhotsk
et l’océan. Quelques heures plus tard, nous apprenons que notre baptême de
l’air de demain est, lui aussi, à l’eau ! Le vent permanent finit tout de
même par dévoiler le sommet de quelques volcans. Ce n’est pas un rêve, nous sommes
bien au bout du monde ! Un cerf-volant égaie le ciel. Quelques courageux
se baignent.
Samedi 15 juillet 2017
Nous n’avons pas fêté le 14 juillet. Pas d’alcool à l’hôtel,
ce n’est qu’une simple cantine avec une piscine découverte. Petite
station balnéaire sur des sources d’eau thermale, les bassins sont rattachés à
d’autres bâtiments et quelques minutes à pied suffisent pour s’y rendre. Nous
sommes à Paratunka, à 50 km de Pétropavlovsk. Il ne faut pas sortir
découvert : les moustiques sont gros et nombreux. Nous nous pulvérisons
tous de répulsif. Pantalon et manches longues sont recommandés. Une vision de cauchemar
dans le bassin, lors de notre première baignade : un homme sort de l’eau,
le dos entièrement rouge, couvert d’énormes piqûres. Il n’y a que sous l’eau
qu’on peut avoir la paix. Le dernier jour, nous constaterons qu’une petite
pièce à l’entrée de l’immeuble de l’hôtel dispose d’un grand réfrigérateur avec
des bouteilles de bière.
La nuit a été difficile : réveillé naturellement à
1H30, j’ai du mal à retrouver un sommeil profond. Pendant que nous savourons un
petit déjeuner russe copieux fait de cacha, blinis et omelette, un rideau de
pluie se dessine derrière les grandes fenêtres. Nous sommes au milieu de la
forêt, la végétation est luxuriante, tout est vert. Nous ne voyons plus le
dessus des montagnes.
Hier, le long de l’immense plage de sable noir, nous avons
pu voir de petites fleurs sauvages très colorées. Soyons positifs. Aujourd’hui, nous prévoyons une sortie
en bateau. L’eau est calme, un véritable lac, dans cette baie très fermées comme il en existe peu dans le monde. Le ciel est couvert, il pleut encore. Les
seules couleurs seront celles des gilets de sauvetage. Nous apprenons que nous
ne mangerons pas sur le bateau. Alors nous allons au restau de crabe, la spécialité
locale. Nous achetons, pour dix personnes, un crabe de 5 kg, que nous choisissons dans un
vivier. Il s’agit du fameux crabe du Kamtchatka, bien entendu. Sa saveur est
exceptionnelle. Avec un simple court-bouillon, c'est délicieux. Une
heure de cuisson tout de même.
Nous finissons par embarquer et longeons la côte sauvage où
de nombreux oiseaux nichent sur les falaises. Ciel gris, océan gris, peu de
vagues mais des ombres noires sautent hors de l’eau sans que je puisse
déterminer la taille et la nature de la chose : ce sont des saumons. Nous
arrivons aux rochers des trois frères, trois monolithes près de la côte, trois
immenses pitons rocheux rappelant la baie d’Ha Long au Vietnam. Le bateau jette
l’ancre. Nous pouvons aller sur l’avant du yacht avec un gilet : pointe
blanche en forme de triangle, glissante, avec une balustrade très basse. Nous
pourrions facilement passer par-dessus bord. Une partie du groupe se prête au
jeu de la pêche au lancer. Les deux ados sont les plus chanceuses, elles sortent
chacune une espèce de rascasse noire aux nageoires latérales en forme
d’éventail.
Nous passons du pont à l’arrière, de l’arrière au salon.
Deux belles tables de victuailles et bientôt du poisson frit. Heureusement que nous ne devions pas manger.
C’est la fin de l’après-midi. Ensuite viennent les crabes. La technique pour
manger les pattes est simple et ludique : cassées aux articulations, la
plus fine extrémité permet de pousser vers le haut la chaire cuite, ferme et
savoureuse coincée dans les autres parties en forme de tube. Nous nous gavons
sans pouvoir terminer tout ce qui nous est proposé. Nous serons obligés de
décommander le repas du soir prévu à l’hôtel.
Le décalage horaire se fait toujours sentir. Enfoncés dans
le canapé en cuir du bateau, les yeux se ferment. Le crachin n’en finit pas de tomber.
Par temps clair, nous devrions voir, tout autour de nous, des volcans aux
sommets enneigés. Retour au port. Deux ou trois d’entre nous ont la chance
d’apercevoir un phoque depuis le poste de pilotage de l’étage, aéré mais
couvert et préservé de la pluie par des bâches plastiques transparentes. Demain sera un autre jour, un autre temps.
A suivre
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire